EUGENE HIDEWAY BRIDGES: Live in Tallahassee (2018)
Certain affirment que le blues est mort avec BB King, le dernier géant du genre. Ils n’ont pas tout à fait tort mais ces propos doivent être nuancés. En effet, quelques artistes s’expriment encore à l’ancienne dans le respect de la tradition. Oh, ils ne sont pas nombreux mais ils perpétuent l’esprit du blues avec talent. Eugene Hideaway Bridges en fait partie et le prouve de très belle manière avec cet enregistrement en public, la scène étant encore le meilleur endroit pour évaluer un musicien. Le guitariste décline toutes les facettes du blues avec une étonnante facilité. Bien entendu, le rhythm’n’blues swinguant à la BB King est présent à l’appel avec « Step by step », « How long », « This old house » et « Take home pay ». Il rend aussi hommage au Chicago blues (« Mom and daddy’s place », « Don’t call it supper ») et au Texas blues musclé (« I can’t wait », « I can’t stop loving you baby », « Rise above it »). La rythmique de « When the blues overtake you » rappelle celle de « It’s all over now » ou de « Memphis Tennessee » mais l’ajout d’un accord mineur dans la montée du refrain marque l’originalité de ce morceau éclairé par un excellent solo de guitare. Mais Eugene ne se limite pas à cela et affectionne aussi la mélodie avec le rock « Hold on a little bit longer » et les titres « Southern soul » et « I can never forget ». Il faut également signaler la splendide ballade « Good old days », le blues lent « Sweet little angel », le très mélodieux « I’m holding on », le slow « I’ll be a king » et la longue introduction instrumentale de « How long will it take ». Eugene vit sa musique et chante très bien. Sa six-cordes est bluesy à souhait. Tour à tour triste, joyeuse, bavarde, larmoyante ou agressive. Et avec ce son clair velouté et claquant en même temps qui fait la marque des grands bluesmen. Eugene possède un jeu de guitare très inspiré qui évoque souvent celui de l’immense BB King. Une seule petite remarque : Eugene devrait se lancer en solo sur les morceaux mélodiques car il en est capable. Il préfère sans doute jouer comme autrefois (à la grande époque, il était plutôt rare qu’un guitariste intervienne sur un slow ou une ballade soul). Il semblerait donc que ce « Live in Tallahassee » devienne rapidement un disque incontournable pour tous les amoureux de la note bleue. Avec Eugene Hideaway Bridges, le blues a encore de nombreuses années devant lui !
Olivier Aubry